Décembre 2021
Editorial.
Chères amies, chers amis des Riches Heures Musicales de la Rotonde.
Contre vents et marées, nous avons tenu, avec vous, et Orphée le chant du monde fut un magnifique festival, porté par la confiance de musiciens enthousiastes. Nous les remercions chaleureusement d’avoir tenu leurs engagements.
Et maintenant, cap sur l’édition 2022. Ce sera « Notre 40ème rugissant », marquant les 40 années d’existence des Riches Heures, dont nous vous dévoilons les grandes lignes dans la présente lettre.
Enthousiastes et volontaires, nous le sommes, mais lucides aussi. Je ne peux que rappeler ce que je souligne depuis au moins le numéro 6 de cette lettre : l’absolue nécessité de forces nouvelles, d’amis prenant des responsabilités dans l’association.
MERCI pour vos soutiens, à vous adhérents, sympathisants, mécènes, et à tous ceux qui apportent leur note personnelle à ce concert.
Gilbert Elkaïm
Président du conseil d’administration.
Point sur l’association.
Décembre est là et 2021 va laisser la place à 2022 : il est temps de faire le point de l’année écoulée.
Gilbert Elkaïm a tiré le bilan de l’édition de notre 39ème festival et Serge Pagès vous parle ci-dessous de l’aspect financier.
Je veux, quant à moi, vous parler de l’association, de vous, très chers adhérents, et de vous aussi, très chers et fidèles amis des Riches Heures Musicales.
Une association est riche de ses soutiens et de ses bénévoles, sans lesquels elle ne pourrait fonctionner.
A ce jour, nous comptons 78 adhérents contre 68 en 2020 ; ainsi que 5 membres d’honneur.
Certains adhérents, fidèles parmi les fidèles, nous suivent et nous soutiennent depuis de nombreuses années, d’autres nous ont rejoints plus récemment et nous espérons qu’ils renouvelleront leur démarche en 2022.
Il faut bien avoir à l’esprit qu’outre l’aspect financier, qui n’est pas à négliger, les adhésions représentent le » nerf de la guerre « . Elles assoient notre rayonnement mais aussi et surtout notre crédibilité auprès des instances publiques qui nous accordent des subventions annuelles, ainsi qu’auprès de nos mécènes. Deux entités sans le soutien desquelles nous ne pourrions assurer notre activité.
L’adhésion vous permet surtout d’être partie prenante de l’activité de l’association en participant aux décisions prises, en devenant membre des instances de direction…
2022 sera l’année du 40ème anniversaire du festival des Riches Heures. Nous allons tout faire pour vous offrir un programme étincelant, Jean Bascou en parle dans ce numéro.
Nous espérons que tous nos adhérents nous restent fidèles en renouvelant leur adhésion (bulletin joint).
Nous espérons également que nous rejoignent tous ceux d’entre vous, amis des Riches Heures, qui nous suivez, pour certains aussi, depuis de nombreuses années. N’hésitez pas à sauter le pas et à adhérer.
Ceux qui le souhaitent peuvent aussi faire un don pour lequel une attestation leur sera fournie, car il ouvre droit à une réduction d’impôt de 66% de son montant.
TOUTE L’ÉQUIPE ESPÈRE VOUS RETROUVER NOMBREUX A NOS CÔTES EN 2022.
L’équipe du Conseil d’Administration est réduite, depuis le départ cet été de la trésorière adjointe Anne Ferré, à sept membres au lieu de neuf. Ce qui a suscité une charge de travail supplémentaire. Nous remercions d’ailleurs certains membres bénévoles qui nous ont assistés au moment du festival.
Nous sollicitons donc les bonnes volontés à venir nous rejoindre. Il est vital pour toute association de se renouveler, et nous ne serions pas trop de 9 au vu de l’ampleur de la tâche.
Là aussi, n’hésitez pas à sauter le pas. Toutes candidatures seront les bienvenues. Elles peuvent nous parvenir jusqu’au jour de l’assemblée générale annuelle.
Cette Assemblée Générale Annuelle de l’année 2021 se tiendra le 15 janvier 2022 à 15 heures.
Nous espérons la tenir cette année en présentiel, car c’est un moment privilégié où nous pouvons nous réunir pour échanger, débattre et partager avec vous le « pot de l’amitié « .
Bien évidemment le vote par correspondance sera également maintenu. Vous serez informés très prochainement des modalités et du lieu de l’assemblée générale.
A très bientôt donc…
Colette Valverde, secrétaire de l’association
Comment nous joindre ?
Rappel ci-dessous de nos coordonnées, le mieux étant notre adresse mail, où les messages sont consultés quotidiennement. Le téléphone fonctionne essentiellement en période de festival.
Les Riches Heures Musicales de la Rotonde – 04150 Simiane-la-Rotonde France
Association loi 1901-Siret 392 217 436 00014
Tel : administration 33 (0) 6 30803828
courriel : festivalaccueil@gmail.com
http://www.festival-simiane.com
Des finances sûres.
Les comptes de la 39e édition se clôturent, ils sont plutôt positifs pour une édition de reprise en situation de Covid et Passe-Sanitaire…
Plus de 560 spectateurs, si l’on inclut le spectacle d’octobre et une fréquentation de 87% de notre jauge fixée cette saison à 100 spectateurs.
Un budget initial à 45.500,00 € revu à la baisse avec l’annulation du concert du 14/08, qui a permis une réalisation à 37.009,00 €, avec un niveau de dépenses à 33.908,00 €.
Résumons :
L’estimation faite au niveau des charges était bonne :
contrats : estimation 19 000€ , réels 18 814€ ;
frais liés : estimation 10 000€, réels 10 551€.
Celle pour les recettes légèrement surévaluée (car un concert de moins) :
estimation 16.000€, réelles 13.009€.
C’est un exercice qui devrait donc, être excédentaire, sous réserve que la Région honore les engagements pris en 2020 sur le versement intégral des sommes votées et termine l’instruction de notre demande 2021 avant le 31 décembre. Au moment où nous bouclons cette lettre, la réponse est positive, donc réjouissons-nous !
Serge Pagès, trésorier
Une belle lecture : « Laisse aller ton serviteur », de Simon Berger. (2020 José Corti)
Illustration : Manuscrit d’une partition de JS.Bach
Ceux qui apprécient la musique de Bach aimeront ce court récit où se mêlent fiction et réalité.
Pendant l’hiver 1705 Jean Sébastien Bach est organiste à Arnstadt. Il n’a que 20 ans mais déjà sa réputation grandit. L’un de ses élèves lui révèle l’existence d’une partition rare de Dietrich Buxtehude , le maître de Lübeck qui fut l’ami de son père Ambrosius. Il en achète un exemplaire, sept cantates sur les blessures et les souffrances du Christ. La découverte de cette musique christique plonge le jeune Bach dans une extase qui ne le quittera plus. Il décide de franchir à pied, malgré le froid glacial, les 100 lieues qui le séparent de Lübeck où vit Buxtehude avec sa famille, un vrai pèlerinage initiatique semé d’embûches, toutes surmontées avec allégresse, comme dans un palpitant roman d’aventure. Mais le moteur ici n’est pas l’amour d’une belle ou la haine d’un ennemi. C’est l’alliance première de la foi et de la musique qui anime le jeune compositeur en quête de vie spirituelle. Il séjournera quelques mois chez le vieux maître, puis repartira transformé. Il n’est plus le même homme ni le même musicien. Buxtehude lui aura enseigné l’humilité extrême, avec des mots de tous les jours : « Nous ne sommes que des serviteurs…Nous faisons de la musique comme les domestiques font la vaisselle » .
De retour à Arnstadt, Bach se sentira incompris . « On voulait une musique qui parlât pour Dieu ; mais quelqu’un venait de lui enseigner qu’il fallait une musique qui parlât de Dieu, à Dieu », suprême abnégation de l’homme et du musicien ! Simon Berger, grâce à un style dense et inspiré, tente d’épouser cette quête spirituelle dans toute sa puissance et son mystère.
Josie
Note : Simon Berger, tout jeune auteur né en 1997, s’est probablement inspiré- mais rien ne le dit- d’un texte du musicologue Gilles Cantagrel ; « La rencontre de Lübeck, Bach et Buxtehude » 2003.
Petit rappel utile…
LES COTISATIONS 2021 (sans changement par rapport à 2020)
Individuel 30 €
Couple 45 €
Pensez aux dons au bénéfice de l’Association des « Riches Heures Musicales de la Rotonde », reconnue d’intérêt général, qui bénéficient d’une réduction d’impôt de 66 % !
Agréable
Vous avez entendu une musique, ou rencontré un artiste qui vous a marqué, lu un livre qui vous a intéressé ou passionné… voire senti quelque humeur, bonne ou mauvaise, à nous lire ? Dites-le- nous, partagez, proposez,
C’était l’été dernier…
Orphée réenchante
« Les Riches Heures ».
Photo Christi La liberté pour les Riches heures
En 2020, le Festival, envers et contre tout, est resté bien vivant. Mais, au plus fort de la pandémie, il a fallu réduire la voilure pour se conformer aux règles sanitaires : seulement deux concerts « hors les murs » et notre habituel cabaret d’automne en partenariat avec « Vivre à Simiane ».
En 2021, toujours en raison de la situation sanitaire, nous avons dû renoncer à certaines manifestations : nos actions en faveur de l’école du village et notre participation à la fête de la musique. Fort heureusement, les concerts de l’été, du 31 juillet au 10 août, ont pu avoir lieu, avec les programmes initialement prévus en 2020, sur le thème » Orphée, le chant du monde ».
Compte tenu des circonstances, cette 39ème édition s’est bien déroulée, avec un bon taux de remplissage et des spectateurs satisfaits. Le passe sanitaire ne semble pas avoir découragé grand monde.
Toutefois, deux déceptions. La déprogrammation d’abord du trio « Musica Humana » le 14 août, la création promise et pré-financée n’étant pas prête. Ensuite le concert lecture du roman de Stefan Hertmans « Le coeur converti » le 12, en partenariat avec le Bleuet. L’organisation et la qualité de cette prestation n’ont pas été tout à fait à la hauteur de nos espérances. Il faudra travailler avec nos partenaires pour améliorer les choses et maintenir un partenariat auquel, de notre côté, nous tenons.
Cela dit, l’essentiel ce sont les 5 concerts programmés par le Festival. Très beaux moments musicaux où le public a partagé notre enthousiasme. Instrumentistes et chanteurs de renom nous ont amenés sur les pas d’Orphée avec des musiques venues de Thrace, d’Italie et du monde élisabéthain, le tout après un prologue théâtralisé qui a d’emblée éveillé la curiosité : mais pourquoi s’est-il retourné ?
Beau succès aussi pour notre soirée d’octobre hors festival, en collaboration avec « Vivre à Simiane » : Anne Calas et Boby Lapointe ont réjoui et dynamisé un vaste public (voir ci-dessous l’interview d’Anne Calas).
Ainsi, après des mois d’assoupissement et parfois d’angoisse, ces musiques et ce « chant du monde » au pays de Giono ont bel et bien réenchanté le fidèle public de la Rotonde.
Josiane Tamburini, vice-présidente
C’était il y a quelques semaines…
Vivre à Simiane et les Riches Heures ensemble le Samedi 9 octobre à la Rotonde pour accueillir…. Devinez qui ?…
Boby La pointe
Nous sommes allés recueillir les impressions d’Anne Calas après ce spectacle, et parler de l’avenir (propos recueillis par Gilbert Elkaïm)
Chère Anne, le 9 octobre dernier, toi et tes complices avaient donné à la Rotonde devant une salle comble (on a même refusé du monde) le dernier spectacle de ta trilogie que nous avons baptisée « troubadours contemporains » ; après Boris Vian en 2018 et Charles Trenet en 2019, c’est Boby Lapointe qui était au programme. Peux tu déjà nous rappeler pourquoi ces choix ?
Ce sont des auteurs. Des hommes érudits, amoureux de la langue qu’ils explorent inlassablement. Et il faut savoir que l’écriture d’une bonne chanson est un grand art. Une chanson est comme un monde d’images et de sensations qui émerge et disparaît en quelques minutes. Il y a une magie à cela.
Ils ont aussi en commun le fantasque, la fantaisie, la drôlerie, une inventivité formidable et une très grande sensibilité. Et n’oublions pas que Boby Lapointe a été soutenu toute sa vie par Brassens, ce qui n’est pas rien. Il faisait ses premières parties et…Brassens épongeait régulièrement ses dettes !
Etais-tu étonnée de l’affluence et de la chaleur du public, car Boby, on pourrait penser qu’il est un peu oublié non ?
L’affluence était due je crois, d’abord, à la fidélité de votre public et à la confiance qu’il vous fait. Et peut-être qu’il nous fait, maintenant qu’il nous connaît. Et puis Boby Lapointe, pour les connaisseurs de chansons, c’est une référence incontournable et c’est quand même extrêmement drôle et vertigineux.
Le choix que tu as fait de scander le spectacle, à travers une transformation, y compris dans les métamorphoses de ton apparence, a révélé une facette de Boby, plus sentimentale, que personnellement je ne connaissais pas ; peux-tu nous en dire plus ?
Sous ses allures potaches et sa dégaine de camionneur, Boby Lapointe était un homme extrêmement sensible et pudique. Certaines de ses chansons sont en effet très émouvantes et belles.
Elles sont moins connues, c’est vrai. Nous avons choisi de clôturer le spectacle avec elles. Pour donner une vision inattendue et intime. Pour nous séparer comme sur un secret qu’on murmure à l’oreille.
Et maintenant, vers quoi vas-tu ?
Nous préparons « L’amour sorcier », chansons de Claude Nougaro. Un terrain de jeu musical extraordinaire ! Et un immense poète ! C’est pour décembre 2021 à Grenoble, en appartement.
Et à Simiane, quand vous voulez !
« Je frotte les mots comme des petits cailloux pour en tirer des étincelles » C. Nougaro
Ce sera … l’année prochaine !
1982-2022 : L’anniversaire !
Un quarantième rugissant…
Créé en 1982, le Festival de Musique de Simiane-la-Rotonde traverse les décennies à l’instar des plus grands festivals tels ceux d’Aix en Provence, d’Avignon ou encore de Sisteron… Il fait ainsi partie du club fermé des plus anciens de notre région.
Depuis deux ans les membres du Conseil d’Administration réfléchissent à la façon de fêter dignement cet événement en 2022, et ont décidé de proposer à Christophe Rousset, directeur des Talens Lyriques, une carte blanche pour la prochaine édition, avec comme seul cahier des charges, celui d’essayer de faire revenir certains des artistes vocaux ou instrumentaux qu’il nous a proposés pendant 10 ans, au cours de sa quête incessante de recherche de nouveaux talents. Il a accepté avec enthousiasme.
Ces artistes, Simiane les a ainsi souvent découverts au début de leur carrière, et va ainsi avoir le privilège de les retrouver au sommet d’une renommée désormais internationale.
Nous réservons notre prochaine lettre d’information pour vous dévoiler leurs noms, mais d’ores et déjà nous pouvons annoncer que nous allons avoir le plaisir de programmer des artistes que tous les plus grands Festivals se disputent.
Nous avons par ailleurs décidé de garder un nombre de 5 concerts, et en majorité de garder aussi le lieu de la Rotonde, tellement lié à l’identité du Festival. Un seul concert, faisant intervenir plus de musiciens, sera localisé dans un lieu pouvant accueillir une jauge plus compatible avec l’ampleur de l’évènement, probablement la Cathédrale d’Apt, en attente de confirmation. La ville d’Apt n’était-elle pas le siège de l’évêché dont Simiane dépendait avant le découpage, souvent arbitraire, des départements au moment de la révolution ?
Les cinq concerts se dérouleront probablement, entre le 5 et le 14 août.
Un quarantième rugissant donc, en continuant de rêver d’en organiser peut-être un cinquantième, hurlant celui-là !
Jean Bascou
Conseiller artistique des Riches heures
Merci à Jacqueline Letzler et Robert Adelson de nous avoir autorisé à reproduire leur article, paru dans des revues musicales importantes, sur le dernier concert de l’été.
Orphée en Haute Provence : L’Achéron au festival de Simiane-la-Rotonde
par Jacqueline Letzter et Robert Adelson
Jacqueline Letzter et Robert Adelson, historienne de la littérature et musicologue, sont les auteurs de nombreux livres, dont Ecrire l’opéra au féminin (Symétrie, 2017), Autographes musicaux du XIXe siècle: L’album niçois du Comte de Cessole (Acadèmia Nissarda, 2020) et Erard: a Passion for the Piano (Oxford University Press, 2021). Ils contribuent à des chroniques de concerts dans le midi de la France.
Dans le vaste paysage festivalier français, le festival de musique ancienne Les Riches Heures Musicales de la Rotonde se distingue par la cohérence de sa programmation musicale. Sa 39ème édition a pris comme thème « Orphée, le Chant du Monde » afin d’explorer les diverses dimensions de la légende de ce plus illustre musicien de la mythologie grecque.
Cantigas de Santa Maria, XIIIe siècle, domaine public, Wikimedia Commons
Dans la nuit du 10 août, près de l’Achéron, un célèbre musicien grec charme ses auditeurs par les douces mélodies de sa lyre. Non, il ne s’agit pas d’Orphée au bord du fleuve séparant les vivants des enfers, mais de Sokratis Sinopoulos, virtuose moderne de la lyra grecque, qui s’était joint au consort de violes de gambe L’Achéron pour clôturer le festival Les Riches Heures Musicales de la Rotonde.
Comme chaque année, les organisateurs du festival ont convié la fine fleur de la nouvelle génération d’ensembles européens spécialisés dans la musique ancienne : Les Timbres (avec le baryton Marc Mauillon), Canticum novum, Comet musicke, Artifices et L’Achéron. Tous les concerts ont lieu dans le joyau architectural du village : la Rotonde, une salle romane ornée de têtes sculptées située au premier étage de la tour d’un château du XIIe siècle. La beauté sobre de ce cadre est propice à l’écoute et l’acoustique est idéale pour des concerts intimistes.
Le programme « Lachrimæ Lyræ, les larmes de l’exil » a été conçu par le violiste Andreas Linos de l’ensemble L’Achéron et fut l’objet d’un enregistrement sur le label Fuga Libera en 2018. L’idée était de réunir deux types d’instruments similaires, mais provenant de contextes géographiques et culturels distants, la viole de gambe et la lyra grecque, et mélangeant des répertoires propres à chaque instrument : la musique de John Dowland (1563-1626) pour consort de violes et des improvisations dans un style grec pour la lyra.
La première partie du concert met à l’honneur les pavanes Lachrimae or Seven Teares de Dowland. Ces pavanes sont une série de variations sur son air « Flow my tears » (Coulez mes larmes), l’un des grands tubes de la Renaissance. Ces variations servent comme tremplin pour les improvisations de Sokratis Sinopoulos et des musiciens de L’Achéron, comme dans un standard de jazz. Dans la deuxième partie, les improvisations grecques alternent avec sept gaillardes de Dowland.
Sokratis Sinopoulos © Sevi Tsoni
Sous les doigts de Sinopoulos, la lyra grecque a un potentiel expressif impressionnant. Cet instrument ressemble à une petite viole de gambe à trois cordes. Sa caisse de résonance, fabriquée d’un seul bloc de bois, est plus petite que celle du petit dessus de viole.
Son timbre acidulé, plaintif, même un peu criard contraste avec la douceur des violes de L’Achéron, un ensemble renommé pour l’homogénéité de sa sonorité. A la différence de la viole, la lyra n’a pas de frettes, ce qui permet des glissements entre les notes et un jeu en quarts de ton. Sinopoulos nous fait oublier que son instrument n’a que trois cordes ; dans ses improvisations hypnotiques, il joue des pizzicati dans le style de Paganini, pinçant les cordes de sa main gauche en même temps qu’il frotte les cordes de son archet, ce qui donne l’impression qu’il y a deux musiciens au lieu d’un seul.
Les membres de L’Achéron (directeur artistique François Joubert-Caillet jouant le dessus de viole, Andreas Linos le ténor de viole, et Aude-Marie Piloz et Sarah van Oudenhove les basses de viole) ont un esprit d’ensemble remarquable. Dans des pavanes jouées à l’archet leur sonorité s’approche de celle d’un orgue, et dans des gaillardes pincées ils donnent l’effet d’un luth.
Dans le recueil enluminé du XIIIe siècle intitulé Les Cantigas de Santa María, une illustration curieuse montre un chrétien espagnol jouant du luth avec un musicien maure jouant de l’oud. Le plaisir partagé entre des musiciens provenant de cultures et de religions différentes, mais liés par la musique et la similitude de leurs instruments est ancien. Nous applaudissons la continuation de cette tradition par la collaboration heureuse entre Sokratis Sinopoulos et les musiciens de L’Achéron.
L’Achéron © Jean-Baptiste Millot
« Lachrimæ Lyræ, les larmes de l’exil »
Sokratis SINOPOULOS & L’ACHÉRON
d’après les Lachrimae or Seaven Teares de John Dowland, sur une idée originale d’Andreas Linos
Sokratis Sinopoulos, lyra grecque
L’Achéron : François Joubert-Caillet, dessus de viole & direction Andreas Linos, ténor de viole
Aude-Marie Piloz & Sarah van Oudenhove, basse de viole
Simiane inspire les musiciens
L’ensemble Comet
Diego Ortiz – Caleidoscopio
(nouveau disque)
L’ensemble Comet Musicke propose un nouveau regard sur l’œuvre, en partie méconnue, d’un grand maître espagnol de la Renaissance parti chercher fortune à Naples. Ce double disque comprend à la fois des œuvres instrumentales du compositeur, revisitées avec une instrumentation originale et colorée mais aussi des polyphonies sacrées de 4 à 7 voix injustement oubliées, ainsi que des pièces instrumentales et vocales issues de ce creuset musical méditerranéen de la Renaissance dont Ortiz fut le véritable alchimiste.
Ce disque, dont nous avons le plaisir d’annoncer la sortie, est le résultat du travail des musiciens de l’ensemble Comet que nous avions accueilli l’été dernier. En marge de la préparation de leur concert à Simiane, ils mettaient la main, par une écoute savante et attentive de leur enregistrement, à leur dernière production, dans une maison de Simiane la Rotonde !